Notes de vipassana (deuxième fois)

Rédigé par Thibaud Saintin Aucun commentaire
Classé dans : On explore (dedans) Mots clés : méditation, vipassanā, retraite, Goenka

Quelques notes prises à l'issue d'une retraite de dix jours de méditation "vipassana" – la deuxième de ma vie, fin octobre 2024. La première, l'année d'avant, m'avait appris qu'il se pouvait se passer quelque chose de puissant qui remettait profondément en question ma manière de penser et de ressentir.

J'avais été bouleversé, au quatrième jour, après d'innombrables turbulences, de sentir mon esprit annihiler la douleur qu'on observe en soi : une sorte de pinceau, d'anneau magique, de circulation de l'esprit dans le corps. Le fameux "banga".

Mais il fallait ENCORE apprendre à ne pas espérer cette libération à chaque méditation. Aussi, épuisé, j'avais simplement réussi à "tenir" les dix jours sans avoir le sentiment de réussir à "pratiquer", de circuler librement dans ce que la technique permet d'expérimenter. J'avais le sentiment d'être en face d'un truc du fond des âges, qui me demandait allégeance. Cette deuxième fois, la pratique a réussi à entrer dans le jeu. Et m'a permis aussi d'apprendre à lui résister : premier pas, peut-être, vers un apprentissage un peu plus profond.

On suit la méthode mise en place par S.N. Goenka, qui se veut laïque et ouverte à tous, et qui prétend être au plus proche d'une supposée pureté des enseignements d'un maître que certains prennent pour un dieu, Siddhartha Gautama. Goenka se présente en héritier d'une forme de pureté, via son propre maître birman, lui-même héritier d'un autre, etc. Il y a peut-être du story-telling là-dedans, et une sorte de rhétorique de l'indicible : "il faut le vivre pour comprendre". Mais Goenka est mort et ne peut plus nous parler. Il y a aussi une rhétoritque de l'efficacité : "fais-le, et tu verras, ça marche".

La structure est hiérarchisée comme dans un temple, supppose une terminologie, une acceptation du rituel et de la répétition, un appel à la constance... On a toujours le choix, toutefois. Il n'en reste pas moins des centres, une communauté de méditants, une technique éprouvée (c'est le moins qu'on puisse dire), la gratuité. Cette rigidité est tout à la fois ce qui a préservé la solidité d'un prodigué par une personne trépassée, et ce qui confine en même temps à sa muséification. Il y a des limites à connaître.

Une impression : pour profiter de cette vertueuse méthode, il faut savoir s'en émanciper. Ou alors, s'y livrer pour toute une vie, à la lettre. Ces notes sont livrées en l'état, relativement proches de l'expérience.

Dernière chose : j'ai trouvé, d'un seul coup, très très concrets certains textes de Michaux, dans Jours de silence. Je crois qu'il suivait plutôt la méthode zazen, mais je ne suis pas sûr. Il y a quelque chose de "terrien" dans vipassana. En tout cas, on se met d'un seul coup à comprendre un texte qui, pour moi, était une invitation et qui est devenu une sorte de description.

J'ai dans un carton en France une édition originale, chez Fata Morgana, je crois.

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