J’habiterai mon nom

Étranger, sur toutes grèves de ce monde, sans audience ni témoin, porte à l’oreille du Ponant une conque sans mémoire :

Hôte précaire à la lisière de nos villes, tu ne franchiras point le seuil des Lloyds, où ta parole n’a point cours et ton or est sans titre…

« J’habiterai mon nom », fut ta réponse aux questionnaires du port. Et sur les tables du changeur, tu n’as rien que de trouble à produire,

Comme ces grandes monnaies de fer exhumées par la foudre.

Saint John Perse, Exil

Autour du Crépuscule du matin : le moment où certains s’endorment et d’autres s’éveillent

Pierre Pachet, dans un entretien, (Les Affinités électives, sur France Culture) signale ce poème de Rimbaud comme l’un de ses préférés, avant d’évoquer la chanson de Dutronc : il est cinq heures… Dans cette optique, par associations d’idées, quelques textes ou chansons évoquant ce moment où certains vont se coucher ou s’endorment, pendant que d’autres veillent ou se lèvent… Liste évidemment ouverte…

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Nous autres savons

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Nous savons la vertu des concurrences

Nous savons la vertu des valeurs de gauche, la proclamons

Nous savons les laisser à leur place

Nous savons éviter tous les systèmes, nous disons le savoir et nous efforcer de penser, non pas « penser », « nous efforcer », parce que nous savons rester modestes, voyons

Nous avons des sourires amusés, presque complices, lorque nous nous saluons, un verre à la main, lorsque nous savons reconnaître, parce que nous savons ne pas oublier un visage et nous savons nous tenir

Nous savons nous réfréner, nous savons la valeur des choses, pour le bien de tous, ce bien que nous savons définir, sur lequel nous savons mettre les mots qu’il faut

Nous savons vite remettre à leur place ceux qui perdent le sens des réalités, avec tact, avec mesure

Nous la connaissons bien, la réalité ; nous l’arrangeons, nous avons des méthodes qui nous permettent de la cerner, de la circonscrire, de la soumettre raisonnablement

Nous savons nous-mêmes nous soumettre à ses besoins, il faut bien préserver les plaisirs de l’existence

Nous savons défendre nos prérogatives, mettre notre confort en premier, « charité bien ordonnée »… nous savons les proverbes qui tombent bien

Nous nous retrouvons pour admirer de l’art, nous savons parler d’une mise en scène, d’un danseur, d’un peintre, avec des mots mesurés, justes, décents, néanmoins sensibles

Nous faisons l’amour, et c’est toujours inoubliable

Nous fuyons plus que tout la vulgarité

Nous fuyons aussi les paroles inutiles, les parleurs qui ne savent pas parler

Nous parlons d’eux avec un amusement discret, sachant rester pudiques, respectueux

Nous connaissons les derniers concepts du temps, ceux auxquels une fréquentation raisonnée de la presse nous a habitués

Nous savons nous présenter, changer d’habit, repecter les convenances, et quand il le faut, nous déguiser

Nous avons voyagé, nous connaissons les grandes villes mondiales, les galeries qu’il faut connaître, les artistes qu’il faut connaître (nous les avons même rencontrés personnellement, ce sont des gens extraordinaires) , les endroits qu’il ne faut pas rater

En voyage nous savons ce qu’il faut voir, visiter, savons « en profiter »

Nous savons qu’il faut connaître Untel et Untel

Nous ne disons pas de gros mots

Nous savons nous organiser efficacement, faire nos preuves

Nous allons une fois par semaine ici, une fois par an là, nous le savons à l’avance, nous le disons en toute modestie

Il a 14 ans et cherche un synonyme du mot mourir

En dehors de la rédaction de brevet (qu’il soit « libanais » ou « français »), que peut-on écrire, au sud du Liban, alors qu’une guerre à peine finie, tant (trop) de langues évoquent sans cesse la prochaine ? On aimerait faire en sorte qu’une fois l’année passée, on ne pose plus la question « Monsieur, c’est juste ? » en montrant ce qu’on a écrit, mais qu’on l’affirme — en qualifiant de « justesse » le plaisir d’avoir pris un risque dans la langue, en acceptant de s’étonner de ce que les mots ont réveillé.

Quelques séances d’écriture créative, donc, publiées sur un blog créé pour l’occasion, avec pseudonymes et commentaires. On espére ainsi qu’à la lecture auto-commentée de leurs textes, ils soient pris au jeu d’une lecture et d’une écriture plus émancipatrices que celles des petites cases d’examens.